“I’m calling you”

 

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Crédit Photo : Théâtre de Vidy

Il cielo non è un fondale d’Antonio Taglierini et Daria Deflorian, Théâtre de Vidy, du 16.11.2016-20.11.2016

Article tiré du blog du Théâtre de Vidy.

Dès les premières minutes, cette pièce me rappelle cette maxime : « Vanité des vanités, tout est vanité ». Les quatre comédiens se demandent sans cesse “qu’est-ce que ça change ?’’. En effet, ce petit refrain revient tout au long de la pièce pour terminer sur cette phrase, qui se répète inlassablement : « De toute façon, ça finit toujours pareil. Les dimanches les gens se disputent ».

Le ciel n’est pas une toile de fond, comme cette toile obscure au fond de la scène. Mais que représente-t-elle exactement ? Elle ressemble à un écran de cinéma par sa taille et son format. Elle se transforme parfois en une partie de la maison. Les comédiens, le sol, la toile… tous sont habillés de noir. N’est-ce qu’un décor épuré, minimal ? Pour moi, au contraire, cette mise en scène devient tout de suite très riche : chacune de ces parties sombres affole notre imagination. Le cerveau rebondit sur chaque recoin pour dessiner les rues de Milan, les jardins publics, le trafic de la ville, le théâtre, le tram, les passants et… les mendiants. Cette toile de fond sur laquelle nos esprits se fixent, comme sur un écran de cinéma pour s’y projeter son propre film, ses propres questions, ses propres problèmes : « Qu’achètent les gens normaux lorsqu’ils font des commissions ? », « Qui a songé à la théorie du radiateur ? », « Pourquoi le vendeur de rose ne comprend-il pas l’italien mais comprend lorsqu’il entend ‘’dégage’’, ‘’sale immigré’’, ‘’va-t-en’’ ?

Et au final, que reste-t-il ? Les comédiens, qui n’arrivent pas à se détacher de leur propre perspective, de leur Weltanschauung, et se croient enfermés dans leurs expériences qui leur paraissent uniques. Pourtant, tout en ne parlant que d’eux, ils transmettent au public des connaissances sur les autres et la ville. L’un raconte son rêve dans lequel pourtant les autres se reconnaissent immédiatement. Les péripéties de la vie s’imbriquent les unes dans les autres. Pourquoi ? Ils parlent de la vie tout simplement. Et la vie, c’est cette petite chanson, qui revient continuellement, c’est ces petits instants de mélodie qui permettent à l’acteur et au spectateur d’entendre son bourdonnement. Comme, lorsque au supermarché, on entend grésiller à la radio « I’m calling you », c’est la vie qui (r)appelle la comédienne tout simplement pour la sortir de ses songes.

Finalement, c’est un véritable jeu de miroir qui se crée sous nos yeux, où les problèmes des uns font écho aux problèmes des autres, où les vies s’entremêlent malgré les différences et les barrières que l’on met pour mieux distancer l’Autre : le mendiant, par exemple, que l’on croise quotidiennement dans les rues de Milan est bien présent. Et cette réalité est si prégnante qu’elle se mêle à l’identité des comédiens, jusqu’à se demander si l’autre n’est pas, en quelque sorte, le reflet de soi.

À propos de Leïla Sahal

Ancienne co-présidente de COSPOL (année académique 2016-2017), j'étais responsable du département Communication de COSPOL (année académique 2015-2016) et je suis membre de l'association depuis 2015. J'ai terminé un Bachelor of Arts (B.A.) en Science politique à l'Université de Lausanne (UNIL) en 2017, je suis actuellement étudiante de Master en Science Politique, orientation Histoire internationale à l'UNIL.

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